La remédiation antalgique ou la thérapie de retraitement de la douleur.

Entraîner le cerveau à réinterpréter les signaux de la douleur, aider à maîtriser la peur engendrée par cette douleur, laisser le cerveau réparer les maux avec ses propres ressources... C’est tout le travail accompli avec le patient lors de la thérapie de retraitement de la douleur (TRD).
Pour la Revue Hypnose et Thérapies Brèves 75.
Dans une étude récemment publiée (1), des chercheurs ont rapporté qu’une thérapie de traitement de la douleur impliquant la réattribution de la douleur à des processus cérébraux ou mentaux au lieu d’indiquer des lésions tissulaires ou des blessures pouvait soulager la douleur et aider à améliorer le processus de récupération. D’autres études ont rapporté que les cas de douleur chronique nociplastique (2) (ou « neuroplastique » car d’autres sensations contemporaines de la douleur peuvent être dysfonctionnelles voire hypersensibles comme l’odorat, l’ouïe, l’olfaction, le tact...), tels la fibromyalgie, les céphalées de tension, les maux de dos chroniques par exemple, sont dus aux processus d’apprentissage des menaces et à la régulation centrale positive (3).
La croyance, dans ce contexte, selon laquelle la douleur est liée à une lésion ou à un dommage tissulaire entraîne également un com- portement d’évitement dû à la peur, ce qui ralentit le processus de récupération et entraîne une douleur persistante. En effet, le comportement d’évitement donne l’impression de se protéger de la peur ou des stimuli anxiogènes. Mais il ne résout pas le problème car il empêche d’affronter ces mêmes situations pour pouvoir s’y ajuster par la suite. La douleur chronique peut être liée à des lésions tissulaires réelles ou potentielles. Cependant, elle peut également survenir après la guérison du corps en raison des changements qui se produisent dans le cerveau. Lorsque les sensations de douleur sont répétitives, les réseaux neuronaux de la douleur dans le cerveau se renforcent et se sensibilisent. Cela conduit à une douleur chronique « apprise ». Le cerveau considère la douleur comme dangereuse, ce qui à son tour provoque davantage de douleur : un cercle vicieux auto-entretenu se produit. La réattribution de la douleur à des processus cérébraux ou mentaux est fondée sur la théorie du retraitement de la douleur. Celle-ci vise à aider les patients à réattribuer la douleur à des voies cérébrales réversibles et non dangereuses et à considérer la douleur comme une « fausse alarme » et non comme la signature de lésions tissulaires. L’objectif de la thérapie de retraitement de la douleur (TRD) est de réduire ou d’éliminer la douleur en entraînant le cerveau à retraiter les signaux de la douleur comme s’ils étaient sans danger.
La TRD vise à rompre le cycle vicieux autoalimenté douleur-peur de la douleur-kinésiophobie-douleur. La thérapie de retraitement de la douleur (la remédiation antalgique) nécessite de la pra- tique patiente, attentive, singulière et progressive. Cependant, à terme, la maîtrise de la peur de la douleur par la pratique de la remédiation antalgique peut réduire voire annihiler la douleur chronique engendrée par le cerveau. Et l’hypnose bien conduite peut contribuer à des changements et même à des métamorphoses salutaires (4) !
Séance dans le cadre d’une thérapie de retraitement de la douleur
« Laissez-vous du temps pour …
Dr Fabrice Lakdja Anesthésiste-réanimateur, médecin psychothérapeute. Exerce à l’Unité de traitement du stress, de l’anxiété et préventions de l’épuisement professionnel à l’Hôpital suburbain du Bouscat (Gironde). Ancien chef de service des soins de support des Centres de lutte contre le cancer.
Pr Gérard Ostermann Professeur de thérapeutique, médecine interne, psychothérapeute. Administrateur de la Société française d’alcoologie, responsable du diplôme d’université de Pathologie de l’oralité, Bordeaux 2.
Commandez la Revue Hypnose & Thérapies brèves n°75 version Papier
Les interactions pour favoriser un changement.
Julien Betbèze, rédacteur en chef, nous présente ce n°75 :
Si l’hypnose ericksonienne est une hypnose relationnelle, cela implique que le lieu d’habitation du corps soit la relation. Ainsi, lorsque la relation est vivante, le sujet vit une expérience corporelle où spontanément il accueille ses ressentis sensoriels, est en capacité de prendre des initiatives. En ce sens, le travail sur les interactions est primordial pour favoriser un changement.
. Guillaume Delannoy, dans un article très pédagogique, nous montre à partir de quatre situations cliniques – douleur psychosomatique, jalousie entre sœurs, obésité morbide, angoisse de mort et tics nerveux – comment la modification des interactions permet l’activation des processus de réassociation. L’auteur, avec la participation de Vania Torres-Lacaze, souligne l’importance du travail de co-thérapie pour rendre possible le changement.
. Delphine Le Gris nous raconte l’histoire de Sophie dont la vie est parcourue de relations insécures et qui cherche une solution à son problème d’insomnie. Elle nous décrit une séance d’hypnose avec un coffre-fort fermé à clé qui va lui permettre d’y enfermer ses ruminations et de retrouver un sentiment de protection.
. L’importance de l’humour est au centre du texte de Solen Chezalviel, dont la créativité ouvre une petite lumière dans un monde empli de noirceur.
. David Vergriete, avec sa grande expérience de prise en charge des addictions, évoque, à travers le cas de Guillaume souffrant d’alcoolisme chronique, l’importance de la qualité relationnelle et la nécessité d’interroger la question du sens et de la trajectoire existentielle.
. Introduction Espace Douleur Douceur.
. Dans l’espace ''Douleur Douceur'', Fabrice Lakdja et Gérard Ostermann nous parlent de la remédiation antalgique. Le retraitement de la douleur vise à réattribuer la douleur à des voies cérébrales réversibles et non dangereuses et à considérer la douleur comme une fausse alarme et non comme la signature de lésions tissulaires.
. Maryne Durieupeyroux nous emmène à la rencontre de Pablo, jeune homme pris en charge en soins palliatifs pour des métastases multiples. Elle utilise le ''gant magique'' et évalue les réactions du patient au fur et à mesure de son travail.
. Charles Joussellin et Gérard Ostermann : Accueillir, écouter et favoriser un effort de narration doivent être au centre de nos prises en charge. La question du sens, de l’anthropologie, sont indispensables à nos métiers de thérapeutes.
. A partir d’un atelier avec Roxanna Erickson-Klein, Evelyne Josse montre l’importance des métaphores pour focaliser l’attention du patient et remettre la vie des sujets en mouvement. Roxanna utilise la métaphore de l’embarquement à bord d’un train pendant qu’Evelyne se laisse bercer par les mots et, dans cet état de transe, développe sa créativité. Les métaphores nous incitent ainsi à reconsidérer, réélaborer et réévaluer nos expériences en ouvrant de nouvelles possibilités pour redevenir auteurs de nos vies.
. Jean-Marc Benhaiem nous décrit la manière dont il comprend la logique de l’intervention en hypnose. Il nous parle des trois modes d’être : mental, sensoriel et confusionnel. Le déséquilibre entre ces modes s’installe au sein des relations dysfonctionnelles, lorsque le sujet, pour se défendre, privilégie un mode au détriment des deux autres. A travers plusieurs situations cliniques, il fait le lien entre l’excès du mental et le contrôle excessif. Pour le thérapeute, il s’agit d’aider le patient à passer de la rigidité à la fluidité, en retrouvant un corps présent.
Les rubriques :
. Sophie Cohen : Christelle et la trichotillomanie en question
. Adrian Chaboche : La présence
. Stefano Colombo et Muhuc : Voyage
. Psychotrauma, PTR, EMDR
. Sylvie Le Pelletier-Beaufond : Le souffle de la guérison au Népal
. Livres en bouche
. Résumé
- Médecines Complémentaires et Alternatives
- Douleur
- Affichages : 1127